Politique – Le réveil de la jeunesse

Autre que l’Oktoberfest, en octobre prochain les bavarois vont élire leur parlement régional. Les campagnes sont déjà lancées à travers les différents corps électoraux. La jeunesse reste au cœur des prochaines nominations citoyennes, avec une lutte contre l’abstentionnisme. Pourtant, certains s’engagent, se retrouvant dans les valeurs des nouvelles propositions politiques. Rencontre avec un jeune militant.  

Sebastian Felsner écoute les remarques sur le système éducatif d’une des participantes, à l’événement de MUT. ©Sophie Hériaud

 

Sous la fraicheur de la gare de Dachau (Allemagne), Sebastian Felsner apparaît. Il sort du métro emmitouflé dans son manteau noir pour vaincre la température, il arrive malgré tout avec un sourire au coin des lèvres. Ce jeune homme originaire de Munich organise ce soir là, une rencontre d’échanges sur l’éducation pour le nouveau parti politique bavarois, MUT. « Aujourd’hui, nous allons discuter d’éducation en nous spécialisant sur le système scolaire. Nous poursuivons la dernière rencontre de décembre» explique t-il. L’événement relayé sur les réseaux sociaux et sur la page internet de MUT se déroule dans une école. Pas n’importe quel lieu, l’établissement Montessori a été choisi pour l’occasion. Le système scolaire est connu pour sa pédagogie davantage tournée vers l’autonomie, la liberté et les échanges. Le mouvement MUT fonctionne dans cet esprit avec une campagne de terrain en s’adressant directement aux acteurs ordinaires de la vie bavaroise. Alors, pas de meilleur lieu pour parler d’éducation, qu’une école. Que cette école.

Malgré le froid dehors, l’ambiance est chaleureuse à l’intérieur. Livres, prospectus et textes informatifs sur l’éducation se partagent la table avec trois chips et deux cacahouètes. Ils n’attendent plus que l’arrivée du petit comité. Dix personnes font le déplacement ce soir. Ils prennent tous place autour de la table. Laissant sa timidité de côté, Sebastian Felsner lance les hostilités et prend la parole. Il explique l’organisation de la soirée, se présente et les invite à le faire à leur tour. Autour de lui, parents, salariés ou étudiantes, écoutent et témoignent. « J’ai rejoint le parti puisque j’estime qu’il est nécessaire de présenter de nouveau la question de l’éducation et de montrer à quel point c’est important », explique Anja Milosevic, 28 ans. Cette jeune femme a quitté le parti SPD puisqu’elle estime que « MUT essaie de changer les choses avec de nouvelles idées modernes ». Pendant deux heures, les participants discutent d’un sujet qu’ils côtoient tous les jours, un sujet qui leur est proche dont ils sont les meilleurs acteurs pour témoigner. Tous ne sont pourtant pas adhérents au parti, mais à l’issue de cette soirée, ils le deviendront peut-être.

 

« S’engager, c’est partager des valeurs »

MUT signifie le courage. Le nom de ce nouveau parti n’a pas été choisi au hasard. Il y a une réelle volonté de ses membres de faire naître un nouveau souffle politique porteur de plus pouvoir citoyen. « L’opposition n’est pas un élément décoratif dans une démocratie » est-il écrit sur le site internet du parti. Ce dernier se place clairement en opposition au parti majoritaire et conservateur bavarois, le CSU. À la tête de MUT, lancé au printemps dernier, se trouvent la députée (anciennement engagée avec le parti des Verts) Claudia Stamm et Stephan Lessenich, professeur en Sociologie à l’Université Ludwig-Maximilians de Munich. La nouvelle force politique organise chaque semaine des évènements d’échanges ouverts à tous, afin de poser ensemble les bases d’un futur programme politique. À l’issue de ces rencontres, les militants espèrent que leur mouvement va redonner espoir en la politique. « Si les citoyens ne vont pas voter c’est simple, c’est parce qu’ils ne se sentent pas représentés par les personnes au pouvoir. C’est un gros problème que l’on connaît ici mais un peu partout en Europe aujourd’hui», justifie d’un air triste, Sebastian Felsner.
Comme le mouvement MUT, le jeune militant est novice dans ce milieu. Au sein de son Université, il a entendu parler de cette nouvelle force politique. Il s’y est engagé directement. De sa propre initiative, il a contacté Stephan Lessenich pour prendre part à l’aventure. Aujourd’hui, il tient une réelle fonction, en tant que porte-parole de l’éducation à MUT. « J’organise des rencontres comme celle d’aujourd’hui pour échanger et gagner de nouvelles idées en terme d’éducation pour la Bavière » sourit-il, fier de son travail. À 27 ans, ce jeune étudiant en master de sociologie reste l’un des piliers du mouvement. Il réduit également la moyenne d’âge du parti. « Je reste le plus jeune membre, la moyenne d’âge reste plus élevé. Alors j’aimerais que d’autres jeunes nous rejoignent », dit-il en rigolant. Comme beaucoup, il a longtemps hésité à rejoindre un parti. « Je trouvais dommage que certains partis perdent leurs identités à force de faire trop d’alliances aux élections, trop de sujets étaient mis de côté comme la thématique de l’accueil des réfugiés ». MUT lui a permis de sauter le pas.

 

Un nouveau système politique

En 2016, les 18-35 ans représentent en Bavière plus de 2 millions et demie de personnes d’après le bureau des statistiques du ministère bavarois, des voix à ne pas écarter. Aux dernières élections nationales de 2017, près de 30% des citoyens ne se sont pas présentés devant les urnes dans la région. Si l’abstentionnisme demeure un problème à régler pour tous les partis, il est vécu autrement par les nouvelles générations. « Il est faux de croire que nous ne parlons pas politique entre nous. Au contraire, nous en parlons beaucoup que ce soit entre amis ou en famille », affirme, le jeune militant du mouvement MUT. Selon lui, la question n’est pas de savoir si les jeunes s’intéressent ou pas à la politique, mais de s’interroger sur l’efficacité du système actuel. Les partis politiques dits « classiques » perdent de leur singularité en choisissant des coalitions. Par contre, ces décisions permettent de conserver ou gagner des sièges électoraux. Les nouvelles générations sont déboussolées. « C’est le système politique actuel qui demeure obsolète, qui ne représente pas de la bonne manière les citoyens. C’est ce qui entraîne le peu d’engagement dans le monde politique. Il faudrait proposer de nouvelles initiatives d’élections ou de représentations. Un élu pourrait ne pas cumuler plusieurs mandats par exemple ». Sebastian Felsner et ses collègues terminent cette soirée, avec la tête, déjà tournée vers la prochaine rencontre. Les candidatures électorales restent possible jusqu’au 2 août. D’ici là, pancartes et affiches vont attendre, la place est aux échanges publics.

 

Sophie Hériaud

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